Loin du tourisme de masse, Froidfontaine est un hameau perché au sommet d’une colline d’où le regard vagabonde dans une mosaïque bigarrée de prés et de forêts. La vue depuis le village, à couper le souffle, figure certainement parmi les plus belles du pays. Honnay, le village voisin, et Froidfontaine sont les plus prisés de l’entité de Beauraing, la septième commune la plus étendue de Belgique avec ses vastes forêts.
Les abords immédiats des bois, les ruelles tournicotantes de maisons et de fermes anciennes, la basse-cour, le petit élevage et les ânes dans les jardins, les aller-retour des tracteurs vers les champs, les tirants de fonte ornementés de l’église Sainte-Catherine font partie du charme.
Aux portes de l’Ardenne belge, la ferme d’acacham est érigée au cœur du village de Froidfontaine, en face de la fontaine qui a donné son nom au village. Froidfontaine préexistait aux Romains, qui ont occupé le site, rasé par des invasions barbares. À l’emplacement de la ferme, des bâtiments successifs ont brûlé les uns après les autres.
L’un d’eux, le château grand-père, était de la même dimension que le bâtiment actuel et réputé pour la taille démesurée de l’évacuation des caves par des tuyaux de chêne. Il s’y trouvait de larges briques cuites présentant l’effigie d’un mystérieux visage conique aux cheveux noués dans le cou, trouvé aussi au cœur de la cheminée.
Les matériaux de construction du château grand-père avaient été conçus pour être durables : le plâtrage étonnamment résistant, les briques massives, les blocs de quartz monumentaux, les épaisses tuiles rouges.
Même les restes humains découverts dans le souterrain partant de la cave et aux alentours de l’église étaient hors du commun. Concernant la cave, les ouvriers chargés de la reconstruction du bâtiment y ont trouvé tant de pièces d’or qu’ils cessèrent de travailler ; il en restait encore suffisamment pour faire le bonheur des propriétaires suivants. Les histoires d’incendie, de trésors et de squelettes hors normes sont pléthore dans le village. La société d’archéologie de Namur assure qu’où que l’on creuse, on met au jour des traces d’incendie et des matériaux insolites provenant probablement du château grand-père, dont on trouve trace jusque dans les murs de l’église.
Il y a deux générations, ce qui était devenu la ferme de tante Jeanne brûla aussi, du fait du chat qui, prenant feu d’une braise échappée du poêle, s’engouffra dans le fenil et déclencha l’incendie. Les villageois se relayèrent pour passer les seaux dans le village car il n’y avait pas encore de pompiers ; le bâtiment calciné fut reconstruit. Oswald, un des quatre fils de Jeanne, se destinait à reprendre la ferme. Cette force de la nature rapportait un cerf sur son dos depuis la forêt jusqu’au village, on l’entendait venir de loin. Il avait tellement le cœur sur la main qu’il rentrait le foin des autres pour la pluie en oubliant le sien. Mais quand la boisson le faisait sortir de ses gonds, le colosse cassait tout. Oswald mourut prématurément ; vengeance de braconnier, dit-on.